L'Etre et l'Avoir
Il était une fois l'Etre et l'Avoir
deux frères auxiliaires du pouvoir
des mots et de la grammaire
cohabitant dans une amitié amère.

L'Avoir dans sa superbe toisait l'Etre
qui peu à peu était rongé de peut-être...
Tu es, tu existes mais qui es-tu ?
Tu vis. Pourquoi ? Au moins le sais-tu ?

Moi, l'Avoir, je possède. Ma vie est confortable.
Mes buts sont précis. Ma vie est quantifiable.

Ma foi, qui suis-je ? Répondit l'Etre. Je l'ignore.
O, mon ami, tu viens d'ouvrir la boîte de Pandore.
S'échappent de ma tête mille questions.
J'ai le vertige; mon esprit est en ébullition.
Pourquoi j'existe ? Quel est le sens de ma vie ?
Ma quiétude vient de m'être ravie.

L'Avoir, quant à lui, plein d'assurance
continua sa vie dans l'abondance
nourri à satiété de plaisirs artiticiels.
Puis, il s'interrogea; il leva les yeux au ciel.
Que suis-je devenu ? Un Midas appauvri
dans ma richesse étouffé, peu à peu rabougri.
A mon tour terrassé par des problèmes existentiels
dans mon désir de joussance, n'ai-je pas oublié l'essentiel ?
Je me suis étourdi dans le superflu, l'éphémère
jusqu'à l'excès, avilissant notre nature mère.
Dans la course pour l'Avoir, j'ai oublié d'Etre
fier de mes certitudes, j'ai banni les peut-être,
les rêves, les espoirs et même les illusions
pour me protéger, me garantir des désillusions.
J'ai même raillé l'Etre, mon frère,
l'Etre mon ami, mon fidèle auxiliaire....

L' Avoir et l'Etre, désormais réconciliés
par la force du verbe, par le verbe liés
conjuguent leurs destin à tous les temps,
unis à jamais par la différence pourtant.
Parfaits auxiliaires quelque peu hébétés
heureux d'Etre, d'avoir et d'Avoir Eté.